N’ayant pas encore accédé à la parole, ils devaient se contenter de se regarder

N’ayant pas encore accédé à la parole, ils devaient se contenter de se regarder. Les mains enfouies dans les baillotes et ligotées, ils ne pouvaient se toucher. De temps en temps la gale, les poux, les excréments et l’urine dans lesquels ils baignaient finissaient par les agacer et ils poussaient des hurlements qui, aux dires de leurs parents, constituaient des indices de leur bonne santé. Victor et Victorine, qui atteignaient leurs deux ans, étaient équipés de la robe à bavette et du bonnet rond à bourrelet pour se protéger le crâne du choc des chutes. Ils portaient autour du cou un collier de gousses d’ail contre les vers et des pattes de taupe pour leur épargner les maux de dents.

Les mouchoirs rouges de Cholet
Michel Ragon
Albin Michel
Michel Ragon - Les mouchoirs rouges de Cholet

Page 58