C’est un processus lent, tortueux, d’abord imperceptible et qui parfois, d’un seul coup, saute aux yeux

C’est ce qu’il arrive aussi chez l’homme que rien n’aille plus, que l’état des lieux se déglingue. Ça et là, par détails et insensiblement, on voit comment se détériore l’esprit : comme la matière. Cela se produit par phénomènes en plus et phénomènes en moins : des éléments sournois s’adjoignent – saleté, poussière, champignons – usure, fatigue, érosion. Sans parler de la rouille qui attaque, ronge et dévore les neurones comme les atomes où elle manifeste ses effets par toute sorte de ralentissements, craquements, courbatures, négligences et approximations. C’est un processus lent, tortueux, d’abord imperceptible et qui parfois, d’un seul coup, saute aux yeux.

Des éclairs
Jean Echenoz
Les éditions de minuit
Jean Echenoz, des éclairs